· 

L'étoile du printemps



 

Il était une fois une étoile fleur. Déjà, être une fleur doit être un état naturel assez agréable, du moins vu du côté humain et plus encore vu d'une photographe. Courtisée par les insectes et les papillons comme une princesse, leur vie nous semble plus douce que celle du chardon ou de l'ortie (piquants mis à part), pourtant eux aussi ont un grand intérêt pour les insectes et les papillons. En plus, une fleur étoile, ou une étoile fleur... c'est forcément la star des fleurs ! La stellaire holostée est pourtant une plante commune dans le sud-ouest, qui fleurit, de fin mars à mai. Bien souvent, les personnes passent à côté sans la voir, sans un regard et c'est bien dommage, elle a tant à nous offrir. 

Stellaire donc, signifie étoile et holostée : entièrement (constituée) d'os, à cause de la forme particulière de ses tiges, anguleuses et renflées aux extrémités, un peu comme un os. Elle est aussi appelée "langue d'oiseau" car ses feuilles sont pointues comme une langue d'oiseau. La nature n'est pas la seule à avoir de l'imagination...

Elle peut être mangée en salade (quelle drôle d'idée !) mais elle n'est pas tendre et en plus il ne faut pas en abuser car elle a des propriétés laxatives (bien fait, na !)

 




 

La stellaire holostée aime l'ombre, mais pas trop. Elle s'étale souvent en lisière de forêt ou dans une clairière ou en bordure de chemin, pour ne pas rester complètement dans l'ombre. En effet, comme l'anémone des bois, elle se dépêche de fleurir avant que les arbres ne se garnissent de la totalité de leur frondaison pour leur grapiller un peu de lumière. Elle arrive après les jonquilles et fréquente les dernières anémones des bois, comme un passage de relais. Et pour ne pas mettre toutes ses fleurs dans le même panier, elle a un truc, elle a une floraison échelonnée. Alors une multitude de boutons attendent leur tour patiemment et la rivalité est moins forte. Elle peut ainsi prendre son temps et faire durer ses blancs massifs pour faire sa star... du haut de ses 20 à 60 centimètres. 

 




 

Quand vous avez repéré vos massifs de stellaires, notez-les. C'est une vivace, donc elle revient tous les ans et ses racines sont des rhizomes. Elle rayonne donc devant nos yeux et dans le sol, un peu plus chaque année et si une débroussailleuse assassine n'est pas passée par là, vous connaitrez leur emplacement avant même qu'elles n'aient fleuries. Les graines tombent en juillet mais leur reproduction n'est pas des meilleures, les rhizomes sont plus sûrs...

Chaque fleur est composée de 5 pétales bifides, c'est à dire partagé au centre mais pas complètement, de sorte que ses 5 pétales semblent être 10, encore un truc pour faire sa star ! et au milieu de ces pétales, 10 étamines (oui elle ne connait que la table de 5...) avec un anthère orangé à chaque bout, comme un coton tige mais en plus distingué...

Ses massifs sont très délicats, les fleurs se serrent les unes contre les autres pour affronter les dernières gelées et se balancent doucement dans la brise fraiche du matin, malheureusement pour le photographe, elle est très sensible au vent.

 



 

Et pour la photographier me direz-vous ? c'est relativement facile. Notre étoile a la décence de ne pas briller trop fort, donc vous n'avez pas à craindre de surexposition de ses fleurs blanches et comme elle pousse naturellement mi-ombre proche des arbres, rien à craindre non plus côté lumière. On peut même surexposer d'un poil pour que les zones d'ombres ne soient pas bouchées, si la lumière n'est pas trop forte. Ensuite il faut choisir son sujet au milieu des massifs de fleurs, isoler la plus belle, en fait souvent la mieux placée par rapport à l'arrière plan, donc souvent la plus grande et la plus dégagée. Trouver la bonne est souvent la partie la plus longue de la photo et les promeneurs passent et repassent sans comprendre, en vous voyant encore plantée au même endroit !

La stellaire a comme un velouté naturel qui ressort et si en plus vous allez capter son essence le matin, lorsque la lumière est encore agréable et tamisée par les arbres, la majeure partie du travail est fait. N'oublions pas que photographier c'est écrire avec la lumière. Les boutons ne sont pas à négliger non plus, ils font de bons sujets.

 



 

L'arrière plan a une importance primordiale. Il faut jouer avec les tapis blancs d'autres stellaires et les trouées de lumière. En général la douce lumière de printemps diffusée à travers les arbres éclaire tendrement notre sujet préféré, il suffit de faire des essais en lui tournant autour. On peut prendre son temps, car la stellaire n'est pas connue comme une championne de course à pieds. Ca permet d'essayer plusieurs ouvertures pour voir le rendu de l'arrière plan appelé aussi bokeh. Le bokeh est primordial en macro-proxi, il n'est pas le même à f4 ou à f11. Il est différent aussi selon sa proximité avec le sujet, plus il en est loin, plus il sera diffus. Il change aussi selon la focale, mais là en principe on a moins de choix, quand on fait de la macro ben on met l'objectif macro ! qui a une focale fixe.

En général, je cherche à isoler la fleur choisie, mais deviner ses copines en arrière plan peut être un plus. Il peut par exemple dessiner une couronne autour du sujet, au lieu de produire un bokeh bien lisse. L'équation parfaite ne se trouve pas toujours au premier coup, ce serait trop facile ! Heureusement on peut y revenir demain, ou l'année prochaine s'il est trop tard.

Je fais la mise au point en général sur les anthères qui avec leur tête orangée apportent une délicate touche de couleur dans cet univers de blanc et attirent les regard. Si on est patient, on verra aussi de petites bêtes qui viendront butiner les anthères pleines de pollen, car la stellaire est une plante mellifère. Les bzzz de toutes sortes viennent donc y faire leur marché. Même si elles sont encore peu nombreuses à ce moment de l'année, il peut y avoir de bonnes opportunités. Et là en principe il ne faut pas traîner car les bzzz elles, elles volent !

 



Écrire commentaire

Commentaires: 1
  • #1

    Berruyer Serge (vendredi, 17 novembre 2023 11:16)

    Belle série et très bon texte ! Beaucoup de recherche ! On apprend beaucoup au fil de ces riches explications.
    Bravo Monique et merci pour ce partage !