Il était une fois, un coin de terre protégé des ravages du temps.
Un coin de terre où les nuages sont plus lourds, la lumière plus rude mais plus belle, sillonné de drailles et de murets érigés de génération en génération, jalonné de croix de pierre, de lacs, de sorbiers et de burons, où les vaches ne regardent pas passer les trains...
Un coin de terre qui a le pouvoir d'arrêter le temps et de conjuguer le passé au présent.
Un coin de terre qué s'appellorio l'Aubrac...
Voilà 13 ans maintenant que j'ai posé mon premier orteil sur le plateau de l'Aubrac. En 13 ans j'ai accumulé pas mal de photos et au fil du temps, l'envie de sortir l’œil du viseur s'est imposée pour réunir ces images et construire une histoire autour. Le scénario est venu assez rapidement, même s'il a été revu et retravaillé un certain nombre de fois pour ne pas dire un nombre certain ! Il y a eu plusieurs versions du récit, mais le plus difficile a été la sélection des photos, jusqu'à la dernière minute, l'une a remplacé l'autre pour mieux coller au déroulement de l'histoire, à moins que ce soit le récit qui se soit adapté aux photos...
Je vous propose donc une journée à ma sauce, la journée idéale d'une photographe qui se régale d'immensité et de grand air. Une photographe chaussée de bottes de 7 lieues qui, d'un pas de géant ou à dos de nuage, pourrait être aux quatre coins du plateau en même temps pour cueillir ses lumières versatiles et les brumes capricieuses du matin.
Le silence n'est qu'un leurre, la vie est là sous ce coussin moelleux.
La terre retient son souffle quelques instants pour mieux laisser la brume l'enlacer. Ses mouvements lents emplissent le vallon, enveloppent les bosses et les rochers, comme une caresse légère, et dévoilent des surprises.
Même quand la brume n'est pas là, ça arrive... un lever de soleil reste un moment où le cœur s'emballe un peu, un instant complice avec la nature, où le soleil vous décroche un clin d’œil en s'étirant de tous ses rayons.
Croix de bois, croix de fer, je n'irai pas en enfer,
croix de bois, croix de pierre, j'irai en Lozère.
Dispersées aux quatre coins de l'Aubrac, elles vous observent d'un même œil digne et mystérieux.
L'automne c'est le mariage de l'eau, des lumières et des couleurs aux reflets chaleureux
L'automne c'est la fête des arbres et des sorbiers.
Puis, après une journée si bien remplie, le jour se recroqueville enfin et le marchand de sable dépose délicatement son large manteau sombre sur les lacs, les sorbiers, les rochers et les croix. Peu à peu, une lente extinction des feux s'opère sous mes yeux, dans le souffle des vaches qui, curieuses, se rapprochent doucement.
Le soleil ne résiste pas, il sait que c'est l'heure de la nuit et qu'il n'y peut rien.
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