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Le téléphore fauve

Il était une fois, une drôle de petite bête, toute en longueur, avec une mine rigolote, une armure dorée sous le soleil, une belle paire d'antennes qui ne cessaient de s'agiter, comme si elles étaient toujours à la recherche du wifi, et un petit regard qui, mine de rien, semblait vous escorter partout. Le téléphore fauve, qui a bien compris qu'on parlait de lui, est un petit insecte agité, qui a toujours des fourmis dans les pattes. Il trotte de long en large sur les hautes herbes, enfin surtout en long, comme si rien d'autre ne l'intéressait que d'arriver tout en haut de sa tige. 


Il a l'habitude de remonter son sujet jusqu'au sommet, et une fois arrivé là, sans tambour ni trompette, il ouvre ses ailes et s'envole. Avec sa bouille marrante et son air toujours pressé, il me fait penser au lapin blanc d'Alice au pays des merveilles, on s'attendrait presque à le voir sortir sa montre !

Alors on croit que c'est facile, il suffit de faire la mise au point sur le bout de son herbe, et d'attendre son arrivée pour déclencher une bonne petite rafale, mais ça ne marche pas toujours. D'abord même en sachant où il va aller, il arrive à vous surprendre, puis vous êtes à merci du moindre petit souffle de vent (en haut de la tige ça balance pas mal à Paris et ailleurs...). J'essaie donc de le prendre souvent le soir quand le vent est tombé, ou le matin avant qu'il ne se lève.

En prime, Môssieur téléphore change souvent d'avis et, alors que vous avez le collimateur bien agrippé sur le bout de sa tige en attendant son bon vouloir, vous vous rendez compte au bout d'un moment qu'il a disparu puis qu'il gambade gaiement sur la tige d'à côté avec un sourire en coin, ou qu'il a tourné à gauche à l'intersection, ou rebroussé chemin... sans doute parce qu'il avait oublié sa montre. Plus c'est petit plus c'est mignon, disait ma grand-mère, mais c'est aussi plus difficile à prendre en photo !


Pour le trouver, ce n'est pas très difficile. Même s'il n'est pas gros, à peine 1 cm de long sans les antennes, c'est un des coléoptères les plus courants. Comme son nom l'indique, il est de couleur fauve et pour faire plus chic, il a le bout des ailes, les yeux et les antennes noirs.

Au printemps, il cherche fortune auprès de sa blonde, ou plutôt de ses blondes, car il a tendance à sauter sur tous les téléphores qui bougent, même s'ils sont déjà pris, le ménage à trois ne lui fait pas peur. Ce qui arrive régulièrement car les accouplements durent assez longtemps. Donc il s'agite beaucoup, car il ne supporte pas la solitude. Puis quand l'été arrive, une fois ses petites affaires faites il redevient plus discret. On le trouve sur les ombrelles blanches des carottes sauvages et sur d'autres fleurs. Il se nourrit en partie de pollen et complète son menu avec de petits insectes, notamment des pucerons.

Le téléphore est un grand romantique. Il aime se percher sur une graminée pour regarder le soleil se coucher et admirer ses belles lumières, quand il n'est pas en train de s'accoupler, quoique, il peut faire les 2 en même temps... et plus il y a de soleil, plus il est actif...

Peut-être que s'il est bien inspiré, il vous récitera un poème...

Ce que préfère, c'est le prendre au décollage, souvent il y a beaucoup de photos pour peu d'élues ou pas d'élues ! vive la rafale ! à l'envol il écarte tout, les bras, les pattes, les ailes, les antennes, (les oreilles je ne sais pas...) en tout cas de face, il a une attitude plutôt marrante. J'essaie depuis plusieurs années et j'ai encore très peu de photo d'envol. Parfois il y a aussi des surprises comme ci-dessus avec ce tipule qui vient s'inviter à la surprise partie des téléphores !


De profil c'est différent, il me ferait plutôt penser à un hippocampe perdu en plein ciel ! mais ça reste plus facile que de face. Il n'est pas très rapide en vol mais il faut avoir suffisamment de lumière pour pouvoir garder une vitesse et une ouverture suffisante. Celle ci-dessous (f4 pour 1/1000ème de seconde) n 'est pas assez nette pour en faire un poster mais c'est mon petit exploit en attendant le prochain !!!

L'été terminé on ne le voit plus. Il passe l'hiver à l'état larvaire, sous les feuilles et les branchages abandonnés. Ses larves se nourrissent de petits escargots et d'autres larves, notamment celles de doryphores pour lesquelles il a une affection particulière. Le téléphore est l'ami du jardinier. Malheureusement les pesticides et autres produits chimiques ont sérieusement réduit sa population, comme beaucoup d'autres insectes d'ailleurs. La nymphose a lieu au printemps et le cycle recommence, le téléphore est prêt à repartir à la conquête de sa nouvelle copine. Heureusement, car comme disait le grand philosophe Claude François : le téléphore pleure quand elle ne vient pas...

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Commentaires: 1
  • #1

    Catherine Chavanne (samedi, 22 août 2020 21:36)

    Magnifique et Magique !
    Merci chère Monique de nous enchanter avec tes photos de l'Univers invisible de Dame Nature !
    Bravo !